Les français habitant à Monaco : les plus-values immobilières réalisées en France entrent dans le champ des prélèvements sociaux – Conseil d’Etat du 21 juin 2021, n° 439354
Les faits
Un couple de ressortissants français fiscalement domiciliés à Monaco, ont réalisé, à l’occasion de la cession, en 2013, de deux biens immobiliers situés à l’Alpes d’Huez, des plus-values qui ont été soumises à la contribution sociale généralisée, à la contribution au remboursement de la dette sociale, au prélèvement social, à la contribution additionnelle au prélèvement social et à la contribution additionnelle au prélèvement de solidarité de 2 %.
Ils ont sollicité la restitution de ces contributions sociales qu’ils ont obtenues devant la Cour d’appel.
Contexte singulier de la Convention franco-monégasque
Pour contraindre Monaco d’accorder plus de concessions à la France, la France sous le Général de Gaulle a instauré un blocus douanier tout le long de la frontière. Craignant que la France leur coupe l’eau, le gaz, l’électricité, le prince Régnier cède et toute une série de conventions sont signées en bloc le 18 mai 1963 (conventions de voisinage, fiscale, douanière, postale, téléphonique, pharmaceutique…).
La convention franco-monégasque, issue de ces tensions, comporte une clause originale en son article 7 : « Les personnes physiques de nationalité française qui transporteront à Monaco leur domicile ou leur résidence – ou qui ne peuvent pas justifier de cinq ans de résidence habituelle à Monaco à la date du 13 octobre 1962 – seront assujetties en France à l’impôt sur le revenu des personnes physiques et à la taxe complémentaire dans les mêmes conditions que si elles avaient leur domicile ou leur résidence en France ».
Conséquences de ce maintien de la domiciliation fiscale en France
Alors même qu’elles ne remplissent pas les conditions de domiciliation fiscale en France prévues par l’article 4 B du CGI, les personnes sont passibles de l’impôt sur le revenu en raison de l’ensemble de leurs revenus comme si elles étaient domiciliées en France.
L’article 7 de la convention ne traite que de l’impôt sur le revenu. Les prélèvements sociaux sont des impositions distinctes, exclues de l’article 7.
Décision du Conseil d’Etat
Les contribuables, de nationalité française et résidant à Monaco, ont réalisé des plus-values immobilières en France soumises aux prélèvements sociaux.
Les plus-values des non-résidents fiscaux français sont soumises à un prélèvement spécifique proportionnel prévu par l’article 244 bis A du CGI.
Or, pour l’application de l’impôt sur le revenu, les ressortissants français installés à Monaco sont en principe considérés comme résidents fiscaux français sur le fondement de l’article 7 de la convention fiscale conclue le 18 mai 1963 entre la République française et la Principauté de Monaco, quand bien même ils ne remplissent pas les conditions de l’article 4 B du CGI.
Les requérants devaient donc être considérés comme résidents fiscaux français pour l’imposition des plus-values immobilières. La base légale de l’imposition devait être l’article 150 U du CGI.
Cet article assujettit aux prélèvements sociaux les revenus de placement des contribuables fiscalement domiciliés en France au sens du CGI. Il assujettit également les plus-values immobilières au 2° de son I, mais sans poser la même condition de résidence au sens du CGI, la seule condition étant que la plus-value soit taxée sur le fondement de l’article 150 U du CGI.
Par voie de conséquence, la résidence fiscale des contribuables découlant de la convention fiscale, et les plus-values réalisées ayant été taxées en vertu de l’article 150 U du CGI, ceux-ci entraient dans le champ des prélèvements sociaux.